CODE41 Mecascape “Sublimation One” : l’art horloger 3.0 ?

C’est une montre de poche ? C’est une horloge de bureau ? Non, c’est un Mecascape ! À l’instar de Superman lorsqu’il vole dans le ciel de Metropolis, le nouvel objet horloger de CODE41 intrigue et fait se poser des questions aux passants incrédules.

Les Lausannois disruptifs nous ont déjà habitués à des montres qui sortent souvent des sentiers battus, mais cette fois, ils sont allés bien plus loin. Ce que nous dévoile CODE41 ici est d’après eux une nouvelle interprétation du temps qui passe qui marque la naissance d’une nouvelle catégorie d’objets horlogers, rien que ça.

Aujourd’hui, on découvre donc en exclusivité nationale le premier prototype fonctionnel de cet hybride horloger, pensé bien plus comme un objet d’art mécanique que comme un accessoire pratique comme on va le voir tout de suite.

CODE41 : qui sont-ils ?

Sur Le Calibre.com, on vous a parlé de CODE41 à plusieurs reprises, que ce soit pour mettre en avant l’évolution de leur collection ANOMALY, pour parler de leurs calibres manufactures ou encore pour découvrir leurs autres projets, parfois provocants, parfois novateurs, parfois osés, mais toujours originaux.

CODE41 fait partie de ces micro-marques adorées par certains, moquées par d’autres, mais qui ne laissent personne indifférent. L’un des points principaux qui interpellent, en plus de l’utilisation exclusive du canal de vente en ligne sans intermédiaire, c’est une stratégie de communication agressive, mais surtout ancrée dans l’air du temps, basée en grande partie sur la viralité et les réseaux sociaux. Le recours fréquent au financement participatif de Kickstarter au début de l’aventure, les vidéos dans lesquelles le dirigeant s’adresse directement aux clients potentiels, le ton humoristique et léger des vidéos d’annonce produit… Tout ceci contribue à donner une image dynamique, décontractée, en phase avec le monde actuel.

Ils ne renient pas leurs origines et on sent dans leur projet un profond respect des racines de l’horlogerie suisse et internationale, mais ils semblent bien décidés à s’affranchir des codes classiques du secteur à de nombreux niveaux. Ce positionnement leur a permis de toucher une cible jeune et connectée, mais aussi et surtout de se créer une communauté impliquée.

La marque a toujours développé ses projets et sa marque en donnant une importance centrale à l’aspect communautaire, notamment en basant certains choix relatifs aux différentes pièces sur des sondages auprès des consommateurs potentiels. En faisant en sorte que cette communauté se sente incluse dans le processus créatif, CODE41 renforce l’esprit de cohésion de leurs suiveurs et facilite le processus de vente. Grâce à cette communauté soudée et engagée, la marque a pu se permettre de se lancer dans des projets de plus en plus fous et de sortir de la norme. 

En 2022, la communauté CODE41 représente plus d’un demi-million de membres en provenance des quatre coins du monde (ils annoncent avoir vendu des montres dans plus de 130 pays.) et l’entreprise déclare un chiffre d’affaires de 10 millions de francs suisses en 2021 pour une équipe de 28 personnes. Après 6 collections et 2 mouvements manufactures, CODE41 a donc décidé d’aller encore plus loin. En effet avec le Mecascape, je crois que l’on peut dire sans prendre de risque qu’une nouvelle étape d’affranchissement des choses établies est en train d’être franchie par ce petit groupe de passionnés qui rajeunit le paysage horloger.

Notons que Kickstarter et les autres plateformes de financement participatif sont souvent assez mal vus dans le monde de l’horlogerie, notamment en raison du succès de marques plus que douteuses, dont Daniel Wellington, Filippo Loreti et autres. CODE41 fait partie des exceptions qui confirment la règle, avec LAVENTURE et d’autres. Ils sont parvenus à utiliser ce crowdfunding comme tremplin de départ, puis à sortir du système et à monter en gamme au fur et à mesure de leur projet.

Comme toute marque, CODE41 ne plaît pas à tout le monde et c’est bien normal. Un des buts affirmés de l’entreprise est de proposer quelque chose de nouveau et de différent dans une industrie qui semble parfois un peu trop statique, ce qui crée bien logiquement des débats et des prises de position souvent très fortes. Avec le Mecascape, l’équipe nous prouve qu’elle n’a pas prévu de rentrer dans le rang de si tôt.

Un Mecascape : qu’est-ce que c’est ?

Pour comprendre ce projet, commençons par nous pencher sur ce nom. Mecascape est la contraction des mots “mechanical” qui se traduit par “mécanique”, et “landscape” qui signifie “paysage”. Il s’agirait donc d’un paysage mécanique, ou d’un objet mécanique en format paysage…

Comme la marque le rappelle maintenant régulièrement, les Mecascapes font référence à la catégorie de ce nouveau type de produit horloger. Leur premier Mecascape est donc celui que l’on découvre ensemble aujourd’hui et il est appelé le “Sublimation One”.

Claudio D’Amore, fondateur de CODE41, explique dans le communiqué de presse que l’idée à l’origine du Mecascape a germée dans sa tête en 2009, donc 7 ans avant le lancement de la première collection ANOMALY. Il aura fallu rencontrer les bons partenaires, mettre au point un plan correctement ficelé et attendre d’avoir les différentes ressources nécessaires pour se lancer dans le projet de manière concrète, mais le voilà.

De ce que l’on comprend des informations de la marque, le Mecascape se veut au croisement de différents objets mécaniques horlogers, mais reste un objet d’art avant tout. Dans le paysage actuel, art mécanique et horlogerie sont souvent associés sous l’œil passionné de Max Büsser (d’ailleurs, allez voir l’interview que l’on a tournée chez lui si ce n’est pas encore fait.), mais CODE41 a décidé de se lancer dans l’aventure en indépendant.

Pour moi, ce n’est pas vraiment une montre de poche, ce n’est pas vraiment une horloge de bureau et ce n’est pas vraiment une pendulette non plus, mais c’est aussi un peu tout ça à la fois. Il est conçu et livré avec les accessoires qui en font un compagnon parfait pour une poche de veste, un bureau plus ou moins bien rangé, un dessus de cheminée, éventuellement un tableau de bord de voiture avec un peu d’inventivité ou autres. Il s’agit donc d’un produit relativement polyvalent, plutôt destiné à être installé quelque part et aisément transportable d’une surface plane à une autre. Mais rentrons un peu plus dans le détail.

CODE41 Mecascape Sublimation One : aspect visuel et fonctions

Visuellement, l’objet joue avec les ombres et la lumière, avec les lignes fortes et les arrondies, avec les angles et les arrêtes, avec brillant et le brossé. Le Sublimation One a une aura industrielle presque futuriste affirmée, tout en gardant de fortes inspirations vintages et le tout s’inscrit assez logiquement dans l’univers de CODE41. Cet aspect métallique aux airs bruts mais travaillés, cet usage de la couleur avec parcimonie, cette transparence importante et ce design, qui se découvre en profondeur sur différents niveaux, rappellent clairement les codes que l’on retrouve sur les montres-bracelets de la maison, mais dans une nouvelle interprétation.

La mise en avant de la mécanique fait aussi partie de l’identité de la marque depuis ses débuts, parfois avec l’imitation de la forme d’une masse oscillante sur le cadran, parfois en présentant une interprétation personnelle du concept de squelettage, parfois en choisissant de mettre une masse oscillante périphérique du côté du cadran, plus récemment en choisissant d’utiliser le saphir comme matériau pour le boîtier de manière à gagner en transparence… Sur le Sublimation One, le mécanisme est encore une fois très largement visible. Il est même omniprésent d’un côté, même si plus discret de l’autre.

Le Sublimation One mesure 10,8 centimètres de long pour 70 millimètres de haut dans son format paysage. Son épaisseur de 8,1 millimètres en incluant les verres en fait un objet élégamment plat qui peut se glisser partout pendant son transport.

Ce Mecascape Sublimation One concentre les informations qu’il transmet sur une seule de ses deux faces, entièrement recouverte d’un verre saphir. L’autre face est un fond en titane dans lequel on découvre un ajourage rond, lui aussi protégé par un verre saphir, qui laisse entrevoir quelques rouages et une partie de la platine du mouvement. Ce fond plein en titane apporte une résistance importante à la structure même du Mecascape et sert de protection contre les agressions du quotidien. Pour un objet qui se veut polyvalent et aisément glissable dans une poche, il est important de pouvoir résister à des torsions, des pressions, quelques impacts et autres vibrations. Il doit aussi pouvoir être posé sur différentes surfaces sans avoir peur de le rayer ou de porter atteinte à sa structure. Le fond en titane grade 5 est donc un choix réfléchi et mécaniquement intéressant. C’est aussi sur le pourtour de ce fond que l’on retrouve les 10 vis apparentes, affirmant encore plus cet aspect mécanique et industriel/chic.

La face recouverte de verre saphir est baptisée “paysage” et offre donc un grand cadran principal sur la partie gauche indiquant les minutes, avec un plus petit cadran imbriqué sur sa partie inférieure gauche, à 7 h, indiquant lui les heures. Un sous-cadran de petite-seconde se retrouve lui aussi imbriqué à 5 h sur le cadran des minutes et un peu plus bas, le balancier est clairement visible en action, ce qui ajoute du mouvement et ce qui donne un peu plus de vie au tout.

Un autre cadran sur la partie inférieure droite du Mecascape indique les heures d’un second fuseau horaire, pour lequel les minutes restent à lire sur le cadran principal. Ce cadran, qui offre la fonction GMT, a un centre transparent sur lequel on devine une représentation d’un planisphère terrestre, clin d’œil au voyage, à l’aspect international de la marque et de la pièce par son positionnement et sa fonction.

La lisibilité n’est donc pas instinctive au premier abord et il faudra un peu de temps pour s’y habituer, mais le Mecascape mise sur l’innovation, le plaisir visuel et la mécanique avant tout. D’Amore l’expliquait déjà dans la première vidéo dédiée au projet en disant que lire l’heure n’était qu’un prétexte pour admirer une belle mécanique en mouvement…

Dans le coin supérieur droit du paysage, on découvre un indicateur de réserve de marche gradué de zéro à huit.

CODE41 indique que dans les recherches artistiques et esthétiques concernant ce Mecascape, le nombre d’or (1,618) et la suite de Fibonacci (cette suite d’entiers dans laquelle chaque terme est la sommes des deux termes qui le précèdent.) furent au centre des réflexions. Cela expliquerait en partie son équilibre et son aspect harmonieux.

Différents mariages de couleurs sont proposés et ces choix sont le résultat des fameux sondages qu’a organisé l’entreprise auprès de sa communauté pendant les mois précédant le lancement de la bête.

Le tout est, en tout cas, intrigant, avec des finitions soignées, un rendu qualitatif et une présence qui attire. Le rendu général change sensiblement en fonction des couleurs choisies, mais on garde un aspect relativement sobre avec des touches un peu plus voyantes.

Mais qu’est-ce qu’il a dans le ventre, cet objet d’art ?

Description technique du Mecascape “Sublimation One”

Pour commencer, son étanchéité à 3 ATM nous rappelle qu’il ne s’agit pas d’un accessoire sous-marin, mais le concept nous l’avait déjà bien fait comprendre et si vous aviez prévu de l’installer dans votre douche pour garder un œil sur le temps qui passe de manière originale pendant un shampoing, “Think Again”.

L’objet annonce une réserve de marche de 8 jours lorsque le mouvement mécanique est entièrement remonté. La taille de l’objet a en effet permis l’utilisation de deux ressors de barillet montés en série, offrant une réserve d’énergie bien plus importante que dans une montre classique. Un remontage par semaine suffira à garder votre Mecascape à l’heure, point intéressant et cohérent pour ce nouveau concept artistiquo-horloger.

Le mouvement d’un nouveau genre enfermé dans ce Mecascape fut bien logiquement conçu pour l’occasion. Dans un mouvement de montre classique, les rouages et autres composants sont en grande partie superposés et imbriqués les uns dans les autres pour gagner de la place. Ici, les composants sont dans leur grande majorité les uns à côtés des autres, à plat, bien visibles et observables à loisir.

Ce mouvement est 100% Swiss Made et considéré comme un mouvement manufacture crée en collaboration avec une manufacture horlogère indépendante Neuchâteloise appelée “Le Cercle des Horlogers” en activité depuis le début des années 2010. Le responsable de cette manufacture explique que l’entité est capable de produire et d’usiner certains composants, notamment pour les prototypes et les petites séries, et qu’ils travaillent avec des partenaires spécialistes pour les plus grandes séries. L’assemblage, le prémontage, les réglages et autres sont en revanche entièrement réalisés dans la manufacture, entre Neuchâtel et la Chaux-de-Fonds. Ce Mecascape est fait de 237 composants dont 39 rubis et on peut en observer la majorité grâce au squelettage.

Des deux côtés du Mecascape, lorsqu’on le tient dans le sens de lecture, on trouve deux couronnes texturées intégrées dans les flancs. Celle de gauche permet de régler l’heure, tandis que celle de droite sert à remonter le mouvement, mais aussi à régler l’heure du second fuseau horaire. Pour le réglage de la date, on utilise un bouton-poussoir dissimulé sur le côté gauche de l’objet, juste au-dessus de la couronne de réglage de l’heure.

Sur les premiers visuels au début du projet, on avait pu découvrir une masse oscillante à la place du cadran GMT, qui fut retirée suite aux retours de la communauté exprimant son peu d’utilité pour un produit ayant pour vocation d’être principalement utilisé de manière fixe, sur un bureau ou autres.

Ce Mecascape est livré avec un étui en cuir offrant en plus un emplacement pour ranger une carte de crédit, et avec un support métallique permettant de placer l’objet sur une table, un bureau ou autres.

Une fois en main, l’aspect qualitatif de cet objet unique ne fait aucun doute. La grande surface recouverte de verre saphir est impressionnante, les finitions sont clairement travaillées et rien n’est laissé au hasard. Celui que vous avons eu entre les mains est encore un prototype, mais les efforts sont là et on se réjouit de voir le résultat sur les pièces mises en vente.

CODE41 Mecascape Sublimation One : mon avis

CODE41 nous présente donc un objet horloger d’un nouveau genre, en restant cohérent avec leur identité et leurs codes, tant esthétiques que philosophiques. Comme d’habitude, que l’on aime ou pas, CODE41 fait parler et ce Mecascape va très certainement déchaîner les passions des adorateurs comme des détracteurs. Vous le savez, chez Le Calibre, on aime se pencher sur des projets qui sortent des sentiers battus. Les jeunes marques qui parviennent à tirer leur épingle du jeu et à se faire connaître en bien dans l’industrie sont rares, mais CODE41 en fait clairement partie.

Le Sublimation One n’est pas pratique ? Normal, il n’est pas fait pour ça. Il est clairement plus conçu pour être contemplé et utilisé au bureau ou au domicile que baladé partout. Il est portable, certes, mais pas vraiment fait pour être utilisé comme une montre de poche. Le Mecascape est donc plus pensé comme un objet artistique que comme un objet pratique, que l’on réserve éventuellement aux occasions spéciales.

En le manipulant un peu, on imagine tout de suite l’effet dans une soirée mondaine, lorsque l’on sortira notre Mecascape de la poche intérieure de notre veste de grand couturier pour vérifier l’heure de début du prochain concert de l’orchestre de chambre, ou la réaction de notre date Tinder nous voyant consulter cet objet d’art pour confirmer l’heure d’arrivée du livreur Uber Eat…

Le Sublimation One est là pour apporter quelque chose de vraiment nouveau, pour créer des discussions, pour permettre aux passionnés touchés par ce type de philosophie de profiter d’une nouvelle manière de la mécanique horlogère, et éventuellement de revendiquer leur amour pour le secteur, tout en prouvant une certaine défiance des choses établies, et une certaine réussite économique, il ne faut pas le nier.

Son prix indiqué est de 9 995 euros TTC. On est presque à l’entrée de gamme des horloges de bureau MB&F avec L’Épée 1839 et c’est un positionnement prix qui classe le Mecascape dans les objets d’art réservés aux passionnés au très fort pouvoir d’achat.

Il est très difficile de se prononcer sur le rapport qualité prix d’un objet si novateur, mais ce qui est sûr, c’est que ce prix reflète les années de recherche, la conception 100% Swiss Made, le choix de matériaux éthiquement sourcés, le mouvement manufacture unique dans l’industrie et la qualité générale du produit. Ce prix confirme l’idée que cet objet d’art est un produit niche, qui s’adresse à une cible très particulière. Du design à la lisibilité, de l’utilisation au prix, rien n’est mainstream dans ce concept, mais le tout est d’après moi vraiment cohérent.

Les pré-commandes sont ouvertes alors cliquez sur le bouton ci-dessous pour en savoir plus ou pour vous inscrire sur la liste d’attente, et utilisez le code LECALIBRE pour profiter d’avantages spéciaux !

Dernière modification de l’article le 01/12/2022

Theophile

Theo – LeCalibre.com.
“En horlogerie, la complication n’est jamais loin…”