La grande popularité du bracelet NATO mérite que l’on s’intéresse à sa riche histoire. Si les militaires l’ont adopté pour ses qualités techniques, c’est grâce à son esthétique et son caractère fashion qu’il a conquis la planète horlogère.
Sommaire
- 1 Introduction
- 2 Les prémices
- 3 Les militaires s’en préoccupent
- 4 Le bracelet G10
- 5 Les avantages du G10
- 6 Et les couleurs ?
- 7 Comment mettre un bracelet NATO sur une montre ?
- 8 Le bracelet d’inspiration « NATO » de nos jours
- 9 Les types de NATO
- 10 Les matières
- 11 Quelques exemples
- 12 « L’affaire » du bracelet NATO de James Bond
- 13 Pourquoi remplacer son bracelet par un NATO ?
- 14 Conclusion
Introduction
Aujourd’hui tout le monde connaît le bracelet NATO, et quand je dis tout le monde j’inclus également « Monsieur et Madame Tout le Monde », pas seulement les amateurs d’horlogerie. Parce que le bracelet NATO c’est bien plus que la fameuse scène de Goldfinger dans laquelle on peut voir James Bond avec sa Rolex Submariner et son bracelet NATO.
En effet le succès populaire actuel du bracelet NATO, c’est à Daniel Wellington qu’on le doit. Cela va surement faire hurler les puristes, mais cela semble évident. Regardez autour de vous, demandez à votre petite nièce ou à vos petits-enfants, aujourd’hui le bracelet de montre en tissu multicolore, c’est cool, que la montre soit signée DW, Cluse ou Patek Philippe, peu importe.
Et pourtant c’est vrai, le terme NATO fait bien référence à la North Atlantic Treaty Organization (ou OTAN en français) et a donc une origine militaire. Dans les chapitres qui suivent nous allons voir de plus près ce qu’il en est, et comment ce type de bracelets (car ils sont plusieurs) est devenu si populaire.
Les prémices
Le 16ième siècle voit apparaître la première « montre-bracelet ». Au 18ième les noms de Jaquet-Droz et Abraham-Louis Breguet sont également cités comme précurseurs de la montre-bracelet. Mais c’est en 1880 que l’on retrouve la trace d’une livraison par Girard-Perregaux de 2000 montres-bracelets à l’armée impériale allemande. Ces montres sont alors équipées d’une grille de protection du verre.
En 1904, la montre que Louis Cartier fabrique pour son ami l’aviateur Alberto Santos-Dumont est conçue pour être portée au poignet, avec un bracelet en cuir. A la veille de la première guerre mondiale, la montre-bracelet est répandue, et pas seulement chez les militaires.
Les militaires s’en préoccupent
C’est après le première guerre mondiale que les armées comprennent l’importance d’équiper les soldats d’une montre « de service ». En effet, le bidasse n’a pas les moyens de se payer une montre personnelle. Et c’est ainsi que des montres apparaissent dans la dotation des soldats. Les bracelets sont alors en cuir, une matière qui résiste assez mal aux conditions de terrain, en particulier dans les théâtres d’opération sous les tropiques.
A la fin de la deuxième guerre mondiale, l’armée américaine définit la norme AF0210, qui décrit ce que l’on peut considérer comme l’ancêtre du bracelet NATO : il s’agit alors d’un bracelet de montre une pièce en toile de coton de 25 cm de long, équipé d’une boucle en acier et de deux passants.
Une évolution de cette norme va poser les bases du futur « NATO » : on voit apparaître un double bracelet, qui va empêcher la montre de bouger le long du bracelet.
Le bracelet G10
Ce n’est qu’en 1973 que le ministère de la défense britannique (MoD) définit un nouveau bracelet montre dans la norme DefStan 66-15 (pour Defence Standard). Cette norme sert de référence aux appels d’offres de l’armée. L’évolution la plus récente de cette norme est la DefStan 66-47.
La norme définit de manière très précise les caractéristiques de ce nouveau bracelet :
- La matière utilisée est le Nylon tissé d’une épaisseur de 1.2mm
- Le code couleur est le 18B25 dans la norme BS4800 (« Dark Admiralty Grey »)
- Le bracelet doit être d’un seul tenant, tout comme la boucle (pas de barrette)
- La boucle et les passants sont fixés par thermo-soudage
- Les extrémités de la bande de nylon et les trous sont scellés à chaud
- Le bracelet a 20mm de large et 280mm de longueur, ce qui doit permettre de le fixer au-dessus d’une combinaison de plongée.
Cela est résumé sur le schéma suivant :
Les avantages du G10
Les avantages de ce bracelet sont importants pour les militaires :
- La toile de nylon permet une meilleure dispersion de la transpiration, et la matière est beaucoup plus résistante dans le temps que le cuir.
- Le fond de la montre n’est pas en contact direct avec la peau, ce qui limite aussi la transpiration.
- En cas de rupture d’une barrette, la montre est toujours maintenue grâce à la deuxième barrette.
- La montre est maintenue entre le deuxième et le troisième passant, ce qui l’empêche de se balader sur le poignet.
- La toile est très résistante, et si la fibre venait à s’effilocher, une simple flamme de briquet suffit à ressouder la toile.
- Le bracelet est facile à placer sur la montre, puisqu’il n’est pas nécessaire de démonter les barrettes pour le mettre.
Le scoop, c’est que ce bracelet ne s’appelait pas « NATO », mais bien « G10 », du nom du formulaire que les militaires devaient remplir pour l’obtenir (en fait le formulaire « G1098 »).
Je n’ai pas retrouvé le nom de l’entreprise qui a remporté le premier appel d’offre, mais en tout cas c’est Phoenix Straps Ltd à Cardiff qui fabrique encore aujourd’hui les « vrais » bracelets G10 de la couleur Dark Admiralty Grey. Ne cherchez pas, ils n’ont pas de site Internet, ou en tout cas je ne l’ai pas trouvé. Cependant vous pouvez parfois retrouver ce nom au hasard d’une recherche sur eBay ou sur Esprit NATO.
Notons encore que les largeurs de 18 et 22mm ont été ajoutées à la norme plus tard. En effet, la CWC « British Military G10 » a fait partie de la dotation militaire anglaise, et elle a un entre-cornes de 18mm.
Et les couleurs ?
Au départ, le bracelet G10 est donc uniquement disponible en gris. Ce n’est que plus tard que les régiments de l’armée britannique vont commencer à commander des bracelets aux couleurs de leurs unités. Le bracelet G10 était référencé dans la nomenclature NSN sous le numéro 6645-99 suivi de 7 chiffres. NSN signifie « NATO Stock Number ». Donc pour désigner ces nouveaux bracelets colorés, c’est finalement le terme de « bracelet NATO » qui s’est imposé. L’illustration ci-après reprend quelques exemples de combinaisons de couleurs de bracelets correspondants à des unités spécifiques de l’armée britannique. Mais pas que, puisqu’on y retrouve l’université de Harvard
Comment mettre un bracelet NATO sur une montre ?
Le placement d’un bracelet NATO sur une montre est très simple, pour autant que l’on comprenne bien le principe de fixation.
Pour cela, vous pouvez au choix : regarder notre vidéo ou lire notre tuto :
Comment monter un bracelet nato ?
Pour ceux qui préfèrent le format texte veuillez cliquez sur “LIRE NOTRE TUTO” ci-dessous.
Le bracelet d’inspiration « NATO » de nos jours
Comme évoqué au début de cet article, le bracelet NATO a conquis la planète horlogère. On le retrouve partout, aussi bien sur des montres fashion telles que DW ou Cluse, que sur des montres haut de gamme comme Oméga et même Patek Philippe.
A ce propos, une Patek Philippe 5960 Chronographe calendrier annuel en platine de 88.000$ montée sur un bracelet NATO de 10$ a fait la Une chez Hodinkee, qui parle d’une « horological hipster epidemic » à NYC tant il est devenu chic de mettre une montre très chère sur un bracelet à 5 francs.
Pour savoir où acheter un bracelet Nato, l’internet regorge littéralement de centaines de sites de ventes de bracelets NATO, à des prix variants entre moins de 10 $ à 400$ pour des bracelets en peaux exotiques.
Mais on vous recommande de passer par nos partenaires :
Les types de NATO
Pour tenter de résumer la diversité des bracelets d’inspiration NATO, le site Esprit NATO est d’une grande aide. Tentons d’y voir clair :
Le Nato
Le « NATO » est un bracelet d’une pièce, thermosoudé ou cousu, avec deux passants entre la boucle et la montre, et un passant de l’autre côté. Il y a deux épaisseurs de nylon sous la montre. Les passants sont généralement de section rectangulaire.
Le « US Military »
Le « US Military », parfois aussi appelé « RAF », est un bracelet d’une pièce, cousu, avec un seul passant non pas acier mais en nylon. Il est considéré comme plus élégant que le NATO.
Ce type de bracelet peut être aussi utilisé avec un « bund », pièce de cuir qui recouvre le poignet sous la montre, caractéristique des montres de pilotes.
Le bracelet « ZULU »
Le bracelet « ZULU » est un bracelet d’une pièce, cousu, avec deux passants métalliques à section ronde du côté de la boucle, avec une seule épaisseur de nylon sous la montre. La montre peut donc glisser librement le long du bracelet.
Le « NATO – ZULU »
Le « NATO – ZULU » est une combinaison des deux : la structure d’un NATO, avec les passants arrondis du ZULU et un total de 4 passants (en anglais il s’appelle en fait « 5 rings strap » en comptant la boucle). Le quatrième passant permet de supprimer la pression exercée sur les barrettes de fixation, comme illustré sur cette photo.
Mais cette configuration n’est pas forcément confortable, et si vous le portez de manière classique, alors le quatrième passant devient un problème, il vous donne l’impression de porter une répétition minute avec les deux passants qui se cognent à chaque mouvement.
Les matières
La matière la plus utilisée dans la fabrication des bracelets NATO est le nylon.
Le cuir est également utilisé, il est alors assez fin pour lui donner la souplesse nécessaire pour se glisser sous les barrettes.
Le tissu naturel tissé Jacquard peut aussi être utilisé, comme sur la Tudor Black Bay Bronze.
Notons que ce bracelet n’est pas un vrai NATO : c’est un bracelet de montre en tissu d’une pièce, dans lequel sont insérés deux barrettes qui se fixent dans les cornes.
Petit clin d’œil avec ces bracelets de Colonna, une petite marque italienne qui fait des bracelets en tissus de confection, dont celui-ci qui était tout à fait assorti à ma chemise !
Terra Cielo Mare a développé un bracelet en fibre de carbone, très fin et très résistant. L’aspect esthétique n‘est pas forcément adapté à tous les modèles, mais c’est un développement intéressant.
Quelques exemples
Voici quelques exemples concrets pour compléter ces explications.
Cette Ollech & Wajs militaire des années 70 est équipée d’un bracelet quasiment conforme au G10, à part les passants arrondis et les coutures :
Ces bracelets Daniel Wellington sont un mixte NATO – RAF, avec le passant en nylon :
Voici une variante dont je n’ai pas encore parlé : le bracelet NASA. Il est particulièrement long et est équipé d’une bande velcro, ce qui permet de fixer le bracelet sur une combinaison d’astronaute, comme pour la Speedmaster dans le nouveau film «First man »:
Mais il y existe également des bracelets de mauvaise qualité, et en voici un exemple : nylon trop fin, mal thermosoudé, les trous ont été mal réalisés, et la boucle est oxydée. Bref, la qualité a un prix, et en dessous de 10€, méfiez-vous !
« L’affaire » du bracelet NATO de James Bond
Il est écrit quelque part que l’on ne peut pas parler de bracelet NATO sans parler de cette fameuse scène de Goldfinger dans laquelle James Bond éclaire sa Rolex MilSub (Military Submariner) de son briquet.
On peut lire partout sur le Net qu’en fait ce n’est pas un vrai NATO, parce que le film étant sorti en 1964, il ne pouvait pas être conforme à la norme du G10 définit par le MoD en 1973. C’est bien clair, et je peux ajouter que la couleur n’est pas conforme au Dark Grey Admiralty et que sa largeur est clairement plus petite que les 20 mm réglementaires. De ce point de vue, la montre a d’ailleurs l’air ridicule avec ce petit bracelet. Mais la différence la plus importante est que ce bracelet ne présente pas les passants caractéristiques du G10. Il s’agit donc d’un simple bracelet en nylon tressé avec une simple boucle.
Corvus Watches a ressorti ce modèle iconique, le voici sur une Rolex Submariner 5512 de 1967.
Pourquoi remplacer son bracelet par un NATO ?
De nombreuses raisons « techniques » peuvent vous inciter à remplacer votre bracelet par un NATO, mais la meilleure raison est simplement que cela vous donne l’impression d’avoir une nouvelle montre.
Reprenez votre ancienne montre qui dort dans un tiroir, celle avec le bracelet cuir un peu abîmé, mettez-lui un bracelet NATO, cela lui donnera une nouvelle jeunesse et vous aurez de nouveau plaisir à la porter. Autre possibilité, le NATO peut changer le caractère d’une montre, comme pour cette MAT California, livrée avec un bracelet caoutchouc très austère, idéal pour l’entrainement de plongée, mais qui avec son NATO couleur sable, donne envie d’aller prendre un cocktail au mess des officiers.
Conclusion
Maintenant que vous êtes incollable sur l’histoire du NATO et sur ses différentes déclinaisons, il ne vous reste plus qu’à tenter l’expérience, si ce n’est déjà fait.
Dernière modification de l’article le 28/01/2021
Passionné d’horlogerie depuis une dizaine d’années, je m’intéresse autant aux marques qu’aux montres, et suis toujours à la recherche de nouvelles marques. Au-delà des aspects techniques et esthétiques de l’horlogerie, j’aime beaucoup rencontrer les créateurs de marques moins connues, comprendre leur démarche, et les faire connaître.
Difficile de vous dire quelles sont mes marques préférées, disons IWC, Tudor, mais aussi Seiko, Ollech & Wajs et Gavox, et beaucoup d’autres.
Je porte un intérêt particulier aux Tissot T12, une appellation peu connue et créée à l’occasion de la sortie du film de Cousteau “Le monde du silence” en 1956.
7 Comments
Paolo Saravia
Waouw! Quel travail! C’est complet et bien écrit. Chapeau et merci car j’ai appris beaucoup de choses (histoire mais aussi raison d’être)
MichelOnTime
Merci Paolo,
j’ai en effet essayé de synthétiser tout ce qu’il y a à savoir sur le sujet.
Bien à toi
Michel
Gérarjunho
Cet article est très bien fait et suffisamment convaincant pour essayer
Merci
SNOWCRAB
Arrêtons un peu l’angélisme…
Vous indiquez que en dessous de 10 euros aucun bracelet n’est de bonne qualité.
Je suis d’accord sur ce point si on achète sur des sites francais.
Dommage quand même que ceux ci pratiquent des marges indécentes sur des produits achetés en gros volume chez nos amis chinois.
Si vous aimez changer souvent de couleur, de matière, de type (NATO, ZULU, etc) vous allez rapidement comprendre qu’il vaut mieux commander directement au pays du soleil levant chez des marchands offrant eux aussi de la bonne qualité pour des prix 5 à 10 fois moins chers sans parler des frais de port ridicules.
Thierry
LeCalibre.com
On dit simplement qu’en dessous de 10€ il faut se méfier.
Et non qu’en dessous de 10 euros aucun bracelet n’est de bonne qualité. Petite nuance. 😉
Loulou
Certes, mais vous parlez de la Chine ou du Japon ? Car le pays du soleil levant, c’est bien le Japon. Les bonnes affaires dont vous parlez sont à traquer surtout dans l’Empire du milieu ;-)
JuliusMassius
Article très complet. Le nato de part sa très grande diversité de couleurs permet de combler tous les amateurs de montre et comme vous l’avez écrit, permet aussi de donner un coup de jeune à certaines montres.
Pour les bracelet à moins de 10 euros, j’achetais avant sur eBay auprès d’un très bon vendeur, des nato pour 7 euros et Jamais eu de soucis avec au niveau des coutures et de la fiabilité.
Un jour j’ai décidé d’acheter deux même bracelets, un chez ce vendeur eBay et un chez Esprit Nato. La différence flagrante est la qualité du nylon, le toucher du nato d’Esprit Nato est très agréable. Le tissu est de meilleur qualité. Pour 5 euros de plus, j’ai un tissu très agréable et la certitude d’avoir un bracelet qui respecte le cahier des charges du nato.
C’est quand même moins cher qu’un cuir ou acier et la durée de vie est énorme donc je reste chez Esprit Nato. Je suis tenté par les nato, vendu chez Hamilton mais le modèle qui m’intéresse ne fait que 18mm. Actuellement je porte un bracelet marine nationale qui serait une invention des militaires français.
Cordialement.