Que penser de la marque chinoise CIGA Design ? Comment a-t-elle fait pour se faire une place dans le monde de l’horlogerie mondiale en si peu de temps ? Appartient-elle vraiment au géant du smartphone Xiaomi et comment est-ce que les deux entités travaillent ensemble ? Est-ce que la CIGA Design X Series est prête à redorer le blason de la Chine dans l’horlogerie internationale ?
C’est le genre de questions que l’on a souvent en évoquant cette marque et aujourd’hui, on est là pour élucider tout ça. La marque nous a envoyé la montre directement de Chine pour un test. Vous allez donc avoir le test et avis d’un franco-Suisse sur la question mais promis, je mets mon côté chauvin de côté pour l’occasion.
CIGA Design X-Series
Résumé
Avantages et inconvénients
- Un design travaillé et réussi
- Un bracelet agréable et unique
- Une technologie anti-choc originale
- Une étanchéité de 3ATM
- Un fond de boîte en verre minéral
- Diamètre un peu trop balèze
Sommaire
CIGA Design : qui sont-ils ?
CIGA Design est une marque de montres chinoise qui a fait du bruit ces dernières années, notamment avec des résultats impressionnants lors de leurs campagnes de financement participatif pour le lancement de différentes pièces plus ou moins inspirées de formes célèbres.
Aujourd’hui, on essaye une version de leurs X-Series, des pièces squelettées jouant avec les formes carrées et les angles arrondis qui ont leur propre identité et qui utilisent des technologies innovantes et brevetées. La marque semble vouloir continuer sa quête ayant pour but de donner une place respectée à la Chine dans le monde de la montre fiable et on va vérifier dans quelle mesure elle y parvient.
Mais tout d’abord, que veut dire CIGA ? D’après le site officiel de la marque, rien de spécial en soit. En revanche, ce serait une abréviation à l’anglaise du nom de la société mère de la marque : XIJIA qui signifie “Amazing”, qui se traduit par “Incroyable”, “Surprenant” ou encore “Stupéfiant”. Tout un programme.
À l’origine de cette marque, on trouve Zhang Jianmin, un designer chinois ayant oeuvré dans de nombreux secteurs dont l’architecture, le graphic design, etc. Il est le fondateur et toujours le chef designer de la marque à ce jour. C’est suite à son rôle de juge dans un salon destiné aux garde-temps à Shenzen en Chine qu’il a décidé de lancer CIGA Design pour redonner un souffle nouveau aux designs d’après lui trop vieillots des montres de manière générale.
CIGA Design et Xiaomi collaborent depuis plusieurs années et voilà comment tout a commencé : Xiaomi possède une plateforme de E-commerce intitulée Youpin sur laquelle CIGA Design s’est mis à vendre des montres. Pendant les 14 premières heures, CIGA Design a battu le record de vente des montres mécaniques sur la plateforme. Cela a logiquement éveillé l’intérêt de Xiaomi qui aurait été séduit par les designs ainsi que par l’intérêt du public et qui a exprimé son désir d’investir dans la maison.
Suite à cette collaboration, les designs des montres ont évolués, notamment avec l’arrivée de la CIGA Design Full Hollow qui reçu différentes awards dans le monde du design et qui a clairement servi de base de réflexion pour cette nouvelle X-Series.
Une autre collaboration intéressante de CIGA Design est celle avec Seagull, autre grand nom de l’horlogerie mécanique accessible à la chinoise dont on parle régulièrement, notamment lors du test de la Seagull 1963.
Les deux firmes collaborent sur différentes projets et partagent des modes de production, des études de marché, etc. Le calibre emboîté dans le Full Hollow était d’ailleurs un Seagull customisé.
90% des ventes de CIGA Design se font en Chine mais la marque développe sa présence à l’international depuis 2019. C’est d’ailleurs en décembre 2019 que sa renommé internationale a fait un bon en avant, notamment grâce au financement participatif concernant la Z-Series Titanium Edition qui a atteint 100% de son objectif de financement de 10 000 dollars en 40 minutes et 600% en moins de 24 heures pour dépasser les 2 700 000 euros au final.
Concernant la X-Series, elle fit également l’objet d’un financement participatif qui a atteint 2,000% des 10,000 dollars demandés en 24 heures. Celui-ci s’est a dépassé le million d’euro, rien que ça !
CIGA Design X-Series : quelques caractéristiques
Penchons nous justement un peu sur ses caractéristiques : Il s’agit d’une montre en acier inoxydable 316L mesurant 48 millimètres de large pour 44 de long et 11,8 d’épaisseur. Si l’on inclut la couronne, on arrive à un carré de 48 X 48 millimètres. Une montre donc assez imposante et même un peu trop imposante d’après moi. J’aurais préféré qu’ils restent sur une idée de 40 millimètres de côté comme sur la Full Hollow plutôt que d’aller se rapprocher des tailles plus “modernes”, mais je sais que les aficionados des gros calibres seront comblés. De plus pour être franc, en noir mat on ne se rend pas vraiment compte que l’on est sur du 48 millimètres.
Cette version est équipée d’un verre saphir pour éviter les rayures du côté du cadran et est vendue avec deux bracelets : un en nylon et un bracelet en silicone noir un peu élastique au design original puisqu’il ne nécessite pas de trous. Grâce à sa structure perforée, l’ardillon s’insère à peu près n’importe où sur le bracelet. La marque explique que le caoutchouc est moins cher que le cuir, plus résistant que le nylon et plus confortable que beaucoup de bracelets. Je suis assez d’accord sur le confort et cette construction permet au matériau de respirer et donc de limiter les problèmes de sudation, pratique pour cette montre qui me fait personnellement penser à une “Summer Watch” et qui a aussi un peu une gueule de montre à porter dans un cockpit de voiture de course, endroit dans lequel la température peut vite grimper…
Les ponts en X que l’on retrouve au centre du cadran squeletté sont en partie recouverts de Super-Luminova, tout comme l’extrémité des aiguilles des heures et des minutes pour un rendu visuel intéressant dans la pénombre.
La construction du boîtier est intéressante puisqu’il est équipé d’un double système d’absorption des chocs qui fait penser à des amortisseurs. Il reprend en partie un concept utilisé sur la Full Hollow dont nous avons déjà parlé, mais en plus développé visuellement et techniquement. La marque explique d’ailleurs que le système de double coque est inspiré des suspensions des SUV Premium. Le concept m’a aussi un peu fait penser au système qui protège le mouvement d’une Jacob & Co Bugatti Chiron qui est posé sur des amortisseurs miniatures. On n’est évidemment pas sur les mêmes tarifs ni les mêmes standards mais on retrouve une idée similaire.
La montre n’est malheureusement étanche qu’à 3ATM, dommage pour une pièce au look si sportif que l’on a envie d’emmener partout. Elle ne pèse que 74 grammes sans le bracelet. Il faudra ajouter environ 20 grammes pour celui en caoutchouc, ce qui amène le tout à un peu moins de 100 grammes pour une montre qui s’oublie assez vite au poignet malgré sa taille.
Le calibre squeletté avec ses ponts en X et ses 25 rubis est annoncé comme étant développé et breveté par CIGA. Il s’agirait donc d’un mouvement manufacture, mais difficile de savoir à quel point Seagull est impliqué dans le processus. On sait en revanche qu’il bat à 21 600 alternances par heure et qu’il annonce 40 heures de réserve de marche pour une marge d’erreur de -15 / +30 secondes par jour.
Le prix catalogue de cette pièce qui a sa propre originalité est d’un peu moins de 400€, ce qui inclut 2 ans de garantie, un beau symbole pour une marque jeune et venant d’une contrée souvent critiquée pour la qualité de beaucoup des produits qu’elle exporte. À noter que en passant par ce lien, il y a actuellement 45€ de remise.
Il existe d’autres version en titane, avec du carbone et autres pour un total de 5 coloris différents, mais je n’ai pas encore eu l’occasion de les avoir entre les mains.
Des squelettes d’entrée de gamme ?
Comme nous en parlions dans notre sélection des meilleures montres squelettes automatiques en dessous de 1500 euros, qui présente d’ailleurs la Z-Series, que nous avons aussi présenté ici. Il est vrai que de nombreux amateurs apprécient le squelette uniquement sur des montres d’exception car c’est sur celles-ci que l’on pourra correctement admirer toutes les finitions et la mécanique en se délectant du travail à la main d’artisans de génie. Je dois aussi dire que mon intérêt pour les montres squelettes d’entrée de gamme diminue avec les années. En revanche, je trouve que c’est toujours cool d’en avoir au moins une dans sa collection et que si vous ne voulez pas y mettre trop de budget, cette CIGA Design présente probablement un des meilleurs rapports qualité / prix du moment.
Le packaging, bien qu’assez simple dans la construction, atteste d’une réelle envie de se démarquer et de proposer quelque chose de ludique, de créatif et d’agréable. On retrouvait un écrin similaire sur d’anciens modèles dont la Full Hollow, mais celui-ci est toujours aussi efficace. Je sais que pour beaucoup, le packaging importe peu, notamment en prenant l’argument que le budget serait mieux alloué en retravaillant la qualité de la montre plutôt que son packaging, mais je fais partie de ceux qui voient l’écrin comme faisant partie intégrante de l’expérience produit. En l’occurrence, réussir à proposer un packaging qui sort de l’ordinaire, qui n’a pas du coûter grand chose et qui donne une impression de qualité à la réception, je dis bravo. En plus, il y a un travail de story-telling en rapport avec le concept du livre, avec la montre faisant partie d’un nouveau chapitre, faisant partie d’une histoire, etc.
Attention ne me faites pas dire ce que je n’ai pas dit : il ne faut évidemment pas se laisser berner par un joli packaging, tout comme on ne juge pas un livre à sa couverture. Mais ici la manoeuvre est réussie.
CIGA Design : la genèse
La marque se vante de créer des montres accessibles, simples et innovantes, ce qui peut se défendre. En revanche, ils expliquent vouloir illustrer le luxe et le raffinement sous une nouvelle perspective et c’est là que l’on se perd un peu. Je n’achète pas vraiment leur axe de communication sur le « CIGA Design watchmaking heritage » etc. même si cette X-Series est cool, je leur accorde. Ils parlent d’artisanat, de travail à la main et autres… selon moi l’intervention humaine dans le processus de création des X-Series est assez limitée.
Ils disent aussi vouloir entretenir un esprit positif et permettre aux passionnés d’horlogerie d’avoir accès à des produits de qualité, mais aussi à une expérience nouvelle comparée à ce qui est disponible sur le marché. Je pense que j’aurais plutôt appuyé mon axe de communication là-dessus, en parlant du rapport qualité / prix, en affichant clairement leurs origines chinoises et en rappelant que c’est entre autres grâce à la main d’œuvre bon marché et l’utilisation des machines que l’on peut proposer de telles montres à un prix si compétitif.
On peut également applaudir la volonté de proposer des designs originaux et non des montres “hommage”, bien que certaines de leurs anciennes montres aient beaucoup été comparées à des Richard Mille en raison de leur boîtier coussin par exemple.
La marque annonce également se baser sur des partenariats stratégiques pour proposer des montres accessibles au très bon rapport qualité/prix, ce qui se vérifie avec la grosse influence de Xiaomi et la collaboration sérieuse avec Seagull, deux grands noms internationaux qui jouent clairement en la faveur de CIGA Design quant au travail sur l’image de marque.
Les brevets et les récompenses de CIGA Design
Depuis sa création, la marque a déposé plus de 40 brevets et a remporté de nombreux prix notamment dans le design, dont 9 Red Dot Design Awards, 2 iF Design Awards et 3 German Design Awards qu’ils sont très fiers de rappeler dans toutes leurs campagnes de communication. La marque se vante d’ailleurs d’être la première marque chinoise à avoir gagné 2 titres au Red Dot : le Best of the Best Award et le iF Gold Award. C’est aussi la première marque chinoise à avoir remporté un titre au GPHG.
D’ailleurs avant de vous donner mon avis final sur cette X-Series, je voulais revenir un peu sur ce GPHG, le Grand Prix d’Horlogerie de Genève, qui est une cérémonie assez reconnue dans l’industrie, bien que décriée par beaucoup en remettant en cause sa légitimité et ses pratiques. Elle est en tout cas enregistrée en tant qu’organisation d’intérêt public depuis 2011. Tous les ans, de très nombreuses maisons de renom participent à cet évènement et soumettent leurs montres aux juges dans plusieurs catégories.
CIGA Design a été récompensé ce qui a permis d’illustrer les progrès de la Chine, souffrant clairement d’une image négative dans le monde de l’horlogerie pour différentes raisons. Cette récompense à un évènement Suisse reconnu dans le monde entier a grandement aider CIGA Design dans sa quête de reconnaissance et de visibilité au niveau mondial.
Depuis 2018, une catégorie a vu le jour : la catégorie Challenge avec le Challenge Watch Prize. Celle-ci concernait les montres connectées et toute autre montre au prix de vente en dessous de 4 000 francs suisses, montant qui est passé à 3 500 francs suisses en 2021, soit un peu plus de 3 400 euros.
En 2018, c’est la Nomos Glashütte Tangente Neomatik 41 Update qui a remporté ce prix Challenge. En 2019, c’était au tour de la Tudor Black Bay P01 de se démarquer, puis à celui de la Tudor Black Bay Fifty-Eight en 2020. Et en 2021, CIGA Design créa la surprise en faisant gagner la CIGA Design Blue Planet. Énorme réussite pour la marque.
CIGA Design X-Series : Mon avis
La X-Series n’a pour le moment pas reçu de distinction ni d’Awards, mais peut-être que cela changera en 2022. Personnellement je trouve que c’est une montre assez fun avec un mouvement squeletté plutôt réussi pour une entrée de gamme. Les ponts en X donnent un effet sympa, tout comme le ressort accumulateur d’énergie et l’ancre avec ses rubis visibles du côté du cadran. Comme je l’évoquais plus tôt, le squelettage des calibres “classiques” d’entrée de gamme ne permet pas d’admirer le mouvement de la même manière que l’on pourrait le faire sur une Patek ou une AP, mais celui-ci est plus que respectable dans sa gamme de prix, certainement en partie grâce à l’expérience de Seagull en la matière.
Comme on le dit souvent chez Le Calibre, notamment dans notre article et vidéo indiquant comment reconnaître une montre à éviter, on préfère voir des maisons qui gardent les finitions du calibre simples mais efficaces, plutôt que de se forcer à imiter des finitions haut de gamme sans budget, ce qui donne souvent un effet cheap. Ici, pas de fioriture sur ce mouvement squeletté qui mari bien les rendus brillants avec les mats et la montre ne se fait pas passer pour ce qu’elle n’est pas. La seule partie aillant bénéficié d’un travail un peu plus recherché est la masse oscillante qui reste sobre tout en offrant des textures et des rendus différents sympas.
Dans les points un peu plus négatifs pour moi, le fond de boîte est en verre minéral et on l’entend clairement lorsqu’on tapote dessus avec l’ongle. Je trouve ça un peu décevant. L’autre point qui me chiffonne un peu, c’est la lisibilité de la montre. Je comprends que le concept soit d’épurer tout au maximum et de laisser place à la transparence et au vide avec un squelettage travaillé, mais l’absence totale d’index est à la limite du dérangeant, surtout au moment de la mise à l’heure.
Le Super-Luminova sur les ponts en X et sur les extrémités des aiguilles est sympa, mais plus pour un aspect visuel que pour un aspect lisibilité, comme le reste de la montre d’ailleurs. Il semble qu’elle ait été pensée plus comme un objet design que comme un garde-temps, ce qui peut se défendre je l’entends, mais je pense qu’il faut bien le noter au moment de l’acheter.
En termes de design, ce n’est pas un style qui me touche particulièrement, mais je trouve ça réussi et je suis sûr qu’elle va plaire aux “Petrol-Heads” et aux amateurs de montres au style un peu industriel mécanique. Les finitions du boîtier noir mat donnent un rendu efficace, les touches de orange sur les côtés avec le rappel de la trotteuse est cool, les pas de vis en « Y » sont des détails sympas, le travail sur la couronne avec l’ajout d’une pièce en plastique stylisée encore une fois dans le thème mécanique est réussi, la tête de gorille hurleur imprimée sur la tranche est discrète et originale tout en ajoutant un aspect animal et un peu agressif à la pièce et le tout fonctionne très bien visuellement.
J’ai porté la montre quelques jours et j’ai eu plusieurs commentaires me demandant de quoi il s’agissait, ce qui prouve qu’elle ne passe pas inaperçue, probablement en partie en raison de sa taille et du orange qui attire l’œil. Le bracelet reprend les « Y » que l’on retrouve sur les pas de vis pour un rappel bien pensé, encore une fois un rendu cohérent et agréable à l’œil. La boucle ardillon logotée peut faire un peu cheap mais le rappel à la couleur acier du calibre est sympa aussi. Il y a clairement du travail en termes de design et ça fait plaisir à voir. On comprend pourquoi la marque met en avant ses récompenses dans le monde du design.
Pour conclure, c’est une montre que je trouve fun qui aurait mérité une meilleure étanchéité pour faire partie des très bonnes options en tant que “Summer Watch” même si les squelettes sont souvent moins étanches. La montre propose un style qui change et si vous n’êtes pas trop plage et que vous avez simplement prévu de vous balader dans votre bolide au soleil cet été, ça reste une option cool et modeste qui ne se prend pas la tête.
CIGA Design continue donc ses tentatives de conquête du monde et de réhabilitation du “Made in China” dans l’industrie et on a hâte de voir ce qu’ils nous réservent pour la suite.
Dernière modification de l’article le 30/10/2023
Basé entre Paris et la région de Genève, avec des explorations fréquentes à l’international, mon itinéraire professionnel m’a vu évoluer de l’événementiel en Asie et du secteur immobilier français en passant par des sphères variées telles que la formation, la création multimédia et l’intelligence artificielle. Ma curiosité m’a conduit vers l’horlogerie sur le tard. Depuis des années, je suis fier de pouvoir partager les subtilités de ce domaine sur lecalibre.com, média devenu une véritable référence francophone sur le secteur !