Vous avez certainement déjà entendu parler de la marque IWC, mais connaissez-vous vraiment cette maison historique et hautement respectée ?
Depuis sa création dans la dernière moitié des années 1800, IWC a su s’imposer et se faire une place dans le paysage horloger mondial, en jouant la carte du spécialiste technique à l’histoire forte qui choisit parfois de rester dans l’ombre et dans l’exclusivité et d’autres fois de taper fort pour attirer l’attention du monde entier.
Aujourd’hui, on découvre ensemble neuf informations passionnantes que vous ne connaissiez probablement pas à propos de la maison. On va parler entre autres de ses origines tumultueuses, de partenaires incroyables, d’une montre au-dessus de 700 000 euros qui indique l’emplacement de 1000 étoiles et d’autres infos croustillantes puis on finira avec des pubs vintages qui ne passeraient pas, mais alors pas du tout aujourd’hui.
Sommaire
- 1 1 : Une marque suisse fondée par un américain
- 2 2 : Des débuts réussis en ingénierie, mais catastrophiques en termes de business
- 3 3 : La Portugaise fut créée pour des hommes d’affaire
- 4 4 : Une collaboration avec le commandant Cousteau ?
- 5 5 : Une collaboration avec Gérald Genta et d’autres géants !
- 6 6 : La toute première IWC est encore visible par le public
- 7 7 : Des liens entre IWC et H.M0ser & Cie ?
- 8 8 : une montre à 700 000 euros indiquant plus de 1000 étoiles
- 9 9 :Un marketing inventif ! Parfois trop ?
1 : Une marque suisse fondée par un américain
IWC est en réalité la concrétisation du rêve d’un ingénieur américain qui a voulu poursuivre son “Swiss Dream” à lui. Cet américain, c’est Florentine Ariosto Jones, un ingénieur horloger très actif à Boston au milieu des années 1800. À cette époque, la France, l’Angleterre et les États-Unis faisaient partie des pionniers de l’horlogerie et représentaient la crème de la crème du secteur. Les États-Unis avaient notamment développé des techniques de production de masse extrêmement efficaces et avant-gardistes, tout en respectant une très haute qualité d’exécution. Cela avait été en partie motivé par les besoins de mesurer le temps précisément pour les opérations ferroviaires, suite au développement d’un réseau de chemin de fer dans toute l’immensité du pays. Les maisons horlogères avaient alors développé ce qui était appelé “le système américain”, mariant certains procédés automatisés à des interventions manuelles pour un résultat ultra efficace.
L’expertise de la Suisse dans le secteur résidait dans l’assemblage de composants, produits par des fermiers dans leurs petits ateliers qui confectionnaient ces pièces pendant les mois d’hiver pour garder une source de revenu lorsque les champs étaient inexploitables. Chacun était donc spécialisé dans la production d’un composant en particulier et des entreprises récupéraient toutes ces pièces pour les assembler et en faire des montres. Le fait de faire produire chaque composant dans des lieux différents et par des artisans différents avaient entre autres l’inconvénient de rendre impossible le contrôle qualité. Les montres sortant de ces processus de production étaient donc peu précises et peu fiables. En parallèle, les fermiers qui développaient un réel savoir-faire dans la production de composants devenaient de plus en plus nombreux. Le pays vu cela comme une opportunité de prendre une place dans le secteur sur le paysage mondial et décida de faire appel aux autres pays pour les y aider. La Suisse mit donc en place des mesures pour favoriser les investissements étrangers sur le secteur. Le territoire proposa des avantages fiscaux et financiers à de nombreux pays pour motiver les investisseurs à venir s’installer et travailler dans l’horlogerie.
Monsieur Jones, voyant le coût ridicule des emprunts et de la main d’œuvre comparés à ceux des États-Unis, décida de se lancer. En 1868, grâce à son enthousiasme et à son expertise en tant qu’horloger, il avait réussi à trouver assez de financement pour se lancer dans l’aventure et aller monter une manufacture horlogère à Schaffhouse, une ville suisse-allemande située dans le canton du même nom.
Il s’agissait d’un projet pour le moins original qu’aucun américain n’avait tenté avant lui. L’idée était d’amener les techniques de production américaines ainsi que l’état d’esprit du pays et de les combiner au savoir-faire et aux traditions suisses pour produire des mouvements haut de gamme à vendre en Suisse, aux États-Unis et dans le reste du monde. C’est cette vision globale qui a inspiré le nom de la manufacture : International Watch Company, ou IWC.
2 : Des débuts réussis en ingénierie, mais catastrophiques en termes de business
Monsieur Jones était un ingénieur et un horloger de haut vol, mais il manquait d’expérience en termes de business. Son but était de produire 10 000 mouvements par an, ce qui représentait alors 7% de l’export suisse. En arrivant, l’accueil n’était pas aussi chaleureux qu’il l’avait espéré. Les locaux avaient vu de nombreux étrangers venir investir pour profiter des avantages mis en place par la confédération pour finalement échouer dans leurs projets et abandonner les locaux et les équipes.
Mais Florentine Ariosto Jones était bien décidé à prouver qu’il était différent. Il employa de nombreux locaux et mit un point d’honneur à engager de nombreuses femmes à des postes à responsabilités, il fit fabriquer ses propres machines-outils dans les entreprises locales en suivant ses plans et ses directives, il prouva aux incrédules qu’il avait tout prévu et tout parfaitement planifié. Ses processus de fabrication étaient parfaits, ce qui résultat en des calibres proches de la perfection eux aussi, en partie grâce au travail d’orfèvre des horlogers suisses qui respectaient à la lettre les instructions de monsieur Jones.
Le problème, c’est que la manufacture avait coûté plus de deux fois plus cher que prévu. Les mouvements avaient donc un coût de production bien plus élevé également. C’était en partie dû au fait que les formations en interne pour apprendre aux horlogers et à tous les techniciens à travailler sur de nouvelles machines avec de nouveaux outils et de nouveaux procédés, prenaient un temps fou. La production était parfaite, mais les investissements nécessaires étaient considérables. De plus, monsieur Jones s’était tellement concentré sur la production qu’il avait complètement laissé de côté la partie commerciale. Il s’est donc retrouvé avec une production annuelle de 10 000 mouvements de très haute qualité, sans personne pour les acheter en raison de leur prix et de l’absence de contrat ou de collaboration avec des marques.
En 1876, malgré ses efforts et le fait que monsieur Jones soit celui qui ait amené le système américain en Suisse ce qui a changé le cours de l’histoire de l’horlogerie, IWC fit faillite. La perte estimée dépasserait un million de francs suisses, une fortune absolue pour l’époque, si bien que Jones dû quitter la ville par peur de représailles. Il rentra aux États-Unis et ne travailla jamais plus dans l’horlogerie.
Pour sauver ce qu’il y avait à sauver, les investisseurs d’IWC décidèrent de restructurer l’organisation et de remplacer Jones par un nouvel arrivant, lui aussi ingénieur et horloger de renom. Résultat ? une seconde faillite. Ce n’est qu’en 1880, après ce second échec, qu’un des investisseurs et producteur de machines à Schaffhouse, Johann Rauschenbach Vogel, décida de prendre les commandes et de racheter IWC. Il apporta son esprit de business man dans l’organisation, en respectant au maximum les notions de perfection horlogère insufflées par monsieur Jones. On peut dire qu’il a bien fait de tenir bon puisque cette nouvelle stratégie porta ses fruits et IWC se fit une place dans l’horlogerie internationale.
3 : La Portugaise fut créée pour des hommes d’affaire
Les explorateurs portugais dont Vasco de Gamma, Magellan et autres ont marqué l’histoire de l’Europe et du monde au 16 ème siècle. Il serait donc logique de nommer une montre en rapport avec ce pays. Et pourtant, la IWC Portugaise, ou Portugieser, n’a rien avoir avec cela contrairement à ce qu’on peut souvent lire. Ses origines remontent aux années 30, lorsque deux hommes d’affaires portugais, Rodrigues et Texeira, se rendent à Schaffhouse et demandent aux équipes de the International Watch Company de travailler sur un nouveau projet : une montre bracelet en acier aussi précise et lisible qu’un chronomètre de marine. Pour ce faire, les ingénieurs d’IWC décident d’intégrer un calibre de montre de poche dans une montre bracelet, qui devra donc adopter une taille bien plus imposante que ce qui se faisait à l’époque. Les premières Portugaises mesuraient donc 43 millimètres de diamètre, soit environ 10 millimètres de plus que les autres montres bracelet de l’époque. Ces Portugieser étaient entraînées par le calibre 74 “savonnette”, qui fut en partie sélectionné pour sa couronne à 3h, fait rare pour l’époque puisque les montres de poche étaient encore très largement la norme et que les calibres de ces dernières avaient la couronne à 12h.
En termes de design, la montre faisait la part belle à la lisibilité, au classicisme et à la simplicité comme on peut le voir sur la première Portugaise, la référence 325. Les heures et les minutes sont indiquées par des aiguilles feuilles de sauge et on retrouve un sous-cadran de petite-seconde à 6h.
De très nombreuses versions de la Portugaise virent le jour au fil des années, dont certaines que l’on retrouvait au poignet de certains grands acteurs Français comme on en en a parlé dans un article.
4 : Une collaboration avec le commandant Cousteau ?
IWC est souvent ramenée aux montres de pilotes puisqu’elle fait partie des marques pionnières dans le secteur, mais la marque a aussi fait beaucoup dans le monde de la montre de plongée. En 2004, IWC collaborait étroitement avec la Cousteau Society, l’organisation d’un des plus célèbres plongeurs français du monde, dont on parle d’ailleurs dans un article sur les montres de plongée si cela vous intéresse. Ensemble, ils ont proposé de nombreux modèles de montres en éditions limitées dont le résultat des ventes allait en partie pour financer l’organisation et des projets en particulier, toujours en rapport avec la sauvegarde des mers et des océans.
Mais en termes de collaboration avec des icônes, ce n’est pas fini…
5 : Une collaboration avec Gérald Genta et d’autres géants !
Comme vous le savez certainement, Gérald Genta fait partie des designers horlogers les plus célèbres de l’histoire, notamment suite à son design de la Royal Oak de chez Audemars Piguet en 1972 et de la Nautilus de chez Patek Philippe en 1976. Ce que l’on sait moins en revanche, c’est qu’il a collaboré avec de nombreuses autres maisons. Par exemple, la même année que le lancement de la Nautilus, Genta a aussi travaillé sur le redesign de la Ingenieur de chez IWC. On reconnait d’ailleurs son inspiration, notamment avec les vis apparentes du côté de la lunette et dans le bracelet intégré, qui a même un petit air du bracelet de la Nautilus avec sa forme en H.
D’autres versions plus récentes se retrouvent parfois au poignets de personnalités comme on l’a vu par exemple dans notre article sur les montres dans la F1.
D’autres personnalités comme le duo Dominique Renaud et Giulio Papi, Kurt Klaus ou encore Richard Habring ont eux aussi participé à des missions aux côtés des équipes de IWC, notamment concernant des complications particulières. IWC, c’est donc aussi des grands noms du secteur !
6 : La toute première IWC est encore visible par le public
Le musée de la marque situé à Schaffhouse propose entre autres la toute première montre de la manufacture ! Une pièce historique qui fut marquée par le temps mais qui reste dans un état remarquable et dont la marque est très fière. Si vous passez dans le coin, allez jeter un œil!
7 : Des liens entre IWC et H.M0ser & Cie ?
La manufacture dans laquelle IWC a commencé appartenait à un certain Heinrich Moser. Ce nom vous dit quelque chose ? Probablement parce qu’il s’agit du fondateur de la maison H.Moser & Cie qui propose des pièces de haute horlogerie qui sortent de l’ordinaire et qui ne suivent que leurs propres règles.
Monsieur Moser a donc aidé IWC à se lancer en leur mettant des locaux à disposition, en leur prêtant de l’argent et en leur donnant des conseils avisés. Pourrait-on encore caresser l’espoir de voir des collaborations entre ces deux maisons de nos jours ?
8 : une montre à 700 000 euros indiquant plus de 1000 étoiles
Avant de passer aux publicités ultra provocantes de la marque, on découvre cette Portugaise Sidérale Scafusia référence 5041, une montre ultra-compliquée au prix catalogue au-dessus de 700 000 euros.
La marque indique qu’une équipe d’horlogers a passé 10 ans à travailler sur le mécanisme de ce chef d’œuvre. Elle est équipée d’un tourbillon à force constante, d’un calendrier perpétuel, d’une seconde morte, elle indique l’heure sidérale en plus de l’heure civile, mais surtout, le fond de boîte représente le ciel étoilé depuis un point de vue qui est décidé par le propriétaire de la montre au moment de sa commande. En retournant la montre, on peut donc observer ce que verrait quelqu’un qui regarde le ciel depuis un point précis de la terre, avec entre 500 et 1000 étoiles visibles sur cet incroyable display. Relativement inutile ? Probablement, mais diablement excitant et poétique ? Carrément !
9 :Un marketing inventif ! Parfois trop ?
IWC fut rachetée par Richemont en l’an 2000. Au début de ce nouveau millénaire, la marque a adopté un axe de communication pour le moins original. Les équipes du marketing ont décidé de se lancer dans la provocation et l’humour aisément qualifiable de grivois, comme on va le voir tout de suite. Le slogan de la marque à cette époque devient “Engineered For Men”, comprenez “Conçu pour les Hommes”.
En termes de provocation, il semble qu’ils se soient inspirés en partie de campagnes du constructeur Porsche qui moquait les autres constructeurs, par exemple avec cette phrase qui se traduit par “Honnêtement, avez-vous passer votre jeunesse à rêver qu’un jour vous posséderiez une Nissan ou un Mitsubishi ?”
IWC a décidé de reprendre le concept, mais de jouer la carte de machisme, avec des pubs print sur lesquelles on pouvait lire “Presque aussi compliqué qu’une femme. Sauf qu’elle est a l’heure.”
Ou encore : « enfin quelque chose à quoi les hommes peuvent se fier »
Ou « Dur à cuir et de plus en plus séduisant avec l’âge. Comme les hommes »
Les années 2000 étaient un autre temps, mais le PDG de l’époque Georges Kern et ses équipes ont tout de même subit le courroux de nombreux défenseurs du droit des femmes et de l’égalité des sexes. Ce coup marketing a parfaitement fonctionné et a mis la lumière sur la maison, qui a utilisé ce succès pour développer une image masculine, puissante, compliquée, précise et osée.
Les années suivantes, ils ont tout de même calmé leur ton et sont devenu un peu plus consensuels et respectueux.
Récemment, au printemps 2022 on a pu voir que leurs équipes de communication continuaient de surfer sur des aspects de buzz et de marketing agressif, notamment avec une campagne mettant en scène une de leur montres, la Da Vinci, couverte de crème, faisant référence à l’attaque de la Joconde au Louvre par un jeune déguisé en vielle femme qui a tenté de briser la vitre blindée protégeant le tableau et à lancé une tarte à la crème sur cette même vitre, dans le but de sensibiliser aux problèmes climatiques.
Pour IWC, cette action rapide, plus ou moins sarcastique et originale rappelle que les équipes de communication sont sur le qui-vive et que la marque veut garder une image en partie provocante, en dehors des clous, éventuellement engagée et résolument inscrite dans son temps.
Dernière modification de l’article le 12/07/2022
Basé entre Paris et la région de Genève, avec des explorations fréquentes à l’international, mon itinéraire professionnel m’a vu évoluer de l’événementiel en Asie et du secteur immobilier français en passant par des sphères variées telles que la formation, la création multimédia et l’intelligence artificielle. Ma curiosité m’a conduit vers l’horlogerie sur le tard. Depuis des années, je suis fier de pouvoir partager les subtilités de ce domaine sur lecalibre.com, média devenu une véritable référence francophone sur le secteur !